Quand on parle d’inflammation, on pense aux quatre signes caractéristiques de la réaction inflammatoire : douleur, rougeur, chaleur et gonflements, surtout s’il s’agit d’une articulation. L’inflammation caractérise également de nombreuses maladies infectieuses, auto-immunes ou allergiques avec une clinique souvent bruyante accompagnée de douleur, d’altérations de l’état général, voire de fièvre. A contrario, dans cet article, nous allons parler d’une inflammation systémique qui passe le plus souvent inaperçue cliniquement. Cette inflammation est dite de » bas de grade », car elle reste discrète, sournoise. Toutefois il s’agit d’une authentique réaction inflammatoire qui ne se perçoit souvent pas cliniquement, à peine détectée au niveau des examens sanguins habituels. Pourtant, elle est au cœur de la plupart des maladies de civilisation. Ce bruit de fond inflammatoire peut à la longue faire des dégâts et favoriser ou amplifier la plupart des maladies chroniques actuelles telles que les maladies cardio-vasculaires, l’obésité, le diabète, le cancer, les maladies neurodégénératives, la dépression…
· D’où vient l’inflammation de bas grade
La réponse n’est pas toujours simple. Il peut y avoir de petits foyers infectieux méconnus comme un foyer dentaire, une parodontopathie ou une infection urinaire peu symptomatique. La surcharge pondérale et l’obésité sont également souvent accompagnées d’une inflammation de bas grade. En effet, on sait que le tissu adipeux libère des hormones pro-inflammatoires qui stimulent les messagers de l’inflammation. Toutefois, vraisemblablement, une des origines les plus fréquentes provient de l’intestin. Un microbiote perturbé (dysbiose intestinale), une muqueuse intestinale malmenée dans le cadre d’une pullulation bactérienne ou d’intolérances alimentaires vont favoriser une augmentation de la perméabilité intestinale (leaky gut). On sait que lors d’une augmentation de la perméabilité de l’intestin, des fragments bactériens pénètrent l’organisme (LPS) et provoquent une réaction inflammatoire de la part du système immunitaire. De plus, sur le plan nutritionnel, il est important de comprendre que notre modèle alimentaire occidental avec son excès de sucres , de produits transformés, de molécules toxiques de la cuisson, favorise une inflammation de bas grade.
· Comment détecter l’inflammation de bas grade
Le marqueur principal de l’inflammation est la Protéine C réactive (CRP) qui est une protéine synthétisée par le foie. Les valeurs dans une infection franche sont souvent élevées pouvant dépasser 100 mg/l alors que des valeurs de moins de 5mg/l sont considérées comme normales. A contrario, dans l’inflammation chronique de bas de grade, les niveaux de la CRP sont très discrets souvent entre 1 et 5.
Sur le plan nutritionnel, le rapport oméga 6/oméga 3 donne une bonne appréciation sur notre capacité à gérer l’inflammation. Son rapport devrait être en dessous de 4 alors qu’il se situe dans notre modèle alimentaire occidental, souvent entre 15 et 20.
· Conséquences d’une inflammation de bas de grade
L’inflammation de bas grade est associée à de nombreuses pathologies chroniques comprenant entre autres les maladies cardiovasculaires, les maladies métaboliques telles que l’obésité ou le diabète, les maladies neuropsychiatriques (dépression, Alzheimer) ou le cancer.
Dans les maladies cardio-vasculaires, on sait actuellement qu’une augmentation de la CRP de plus de 3 mg/l serait un marqueur fiable de risque cardio-vasculaire Ainsi, la présence d’un état inflammatoire de bas grade serait un facteur pronostic d’une maladie cardiovasculaire plus pertinent que le dosage du cholestérol. En effet, on sait que les atteintes des coronaires (infarctus, angine de poitrine) sont caractérisées par un processus inflammatoire au niveau des plaques d’athérome sur la paroi des artères et que l’inflammation joue un rôle déterminant sur le pronostic .
Dans les maladies métaboliques, on sait que la surcharge pondérale ou l’obésité est associée à une inflammation de bas grade. Cette inflammation est expliquée par les médiateurs inflammatoires générés par les tissus graisseux.
Dans les maladies neuropsychiatriques, il existe une accumulation de preuves scientifiques qui démontrent que la dépression majeure est reliée à un état inflammatoire systémique associé à une augmentation de la CRP et de l’interleukine 6. Cela peut s’expliquer par le fait qu’une carence en sérotonine (notre neurotransmetteur qui nous rend zen) est provoquée en premier lieu par des états inflammatoires de bas grade. En effet, lors d’une inflammation systémique, les messagers de l’inflammation se propagent dans tout l’organisme, pénétrant les cellules cérébrales et perturbant la synthèse des neurotransmetteurs tels que la sérotonine ou la dopamine. Cette baisse des neurotransmetteurs peut expliquer des états de fatigue, des troubles de l’humeur, des troubles du sommeil ainsi que des dépressions.
Ces états inflammatoires de bas grade sont également impliqués dans de nombreuses situations médicales concernant entre autres la croissance des tumeurs, la réponse douloureuse au cours d’arthrose, l’ostéoporose post-ménopausique. Nous comprenons pourquoi gérer cette inflammation de bas grade est un élément majeur et incontournable pour notre santé.
· Prise en charge naturelle de l’inflammation de bas grade
1. L’importance d’une alimentation anti-inflammatoire
Notre modèle alimentaire occidental est pro-inflammatoire en raison d’un excès de sucres et de féculents, excès de molécules dénaturées par les cuissons fortes, de produits transformés et de graisses pro-inflammatoires de type oméga 6. Ces déséquilibres nutritionnels agissent comme de puissants modulateurs pro-inflammatoires et sont responsables d’une augmentation des risques cardio-vasculaires et des risques de développer un cancer. De plus, notre mode de cuisson est souvent trop agressif générant de nombreux composés pro-inflammatoires (huiles trans, corps de Maillard).
À l’inverse, une alimentation santé de type méditerranéenne réduit les paramètres inflammatoires avec de nombreux effets protecteurs sur la santé. Ce modèle alimentaire insiste sur l’importance de la consommation des légumes et des fruits de saison, des noix, des céréales complètes, de l’huile d’olive comme source de gras principal, de la consommation de poissons et de viandes blanches ainsi que du vin rouge de façon modérée.
2. Le rôle important des polyphénols.
Il est certain que l’on va retirer des bénéfices à réduire les sucres, les féculents, les farines blanches, les produits transformés et les mauvaises graisses qui sont tous pro-inflammatoires. Mais un des éléments les plus bénéfiques dans la diète Méditérranéenne est la présence de substances naturelles antioxydantes et anti-inflammatoires que l’on appelle les polyphénols. On les trouve principalement dans les fruits, les légumes et les épices, c’est ce qui donne la couleur aux aliments par exemple les légumes orange comme la carotte ou la patate douce sont riches en bêta-carotènes alors que les aliments rouges tels que la tomate ou la pastèque seront plus riches en lycopène. Il existe de nombreux polyphénols aux vertus multiples, raison pour laquelle il est conseillé de varier les légumes et les fruits pour bénéficier des nombreux effets protecteurs et anti-inflammatoires. Souvent la recommandation la plus parlante ou visuelle est de proposer de manger coloré, ce qui implique de mélanger les divers polyphénols. Il existe également la possibilité chez ceux qui ne consomme pas suffisamment de fruits, légumes ou épices, de prendre des compléments alimentaires riches en polyphénols tels que le gingembre, le thé vert, l’extrait de papaye fermenté… Un des polyphénols les plus puissants et le plus documenté scientifiquement est la curcumine du curcuma.
3. Le rôle primordial de l’équilibre des acides gras oméga6/ oméga 3
Certaines graisses polyinsaturées ont un effet plutôt pro-inflammatoire (oméga 6) alors que d’autres sont anti-inflammatoires (oméga 3). Ainsi, les omégas 3 comme l’acide alpha-linolénique (ALA), l’acide eicosapentanoique (EPA) et l’acide docosohéxanoique (DHA) sont fondamentalement favorables pour notre santé. En fait, ce qui est important, c’est le ratio entre les graisses inflammatoires (omégas 6) et anti-inflammatoires (omégas 3). Idéalement, ce ratio devrait être au moins inférieur à 4, souvent dans la diète occidentale habituelle, on constate des ratios de 20/1 à 50/1, ce qui génère un terrain inflammatoire. La solution est en premier lieu d’éviter certains omégas 6 qui sont des bombes inflammatoires, il s’agit notamment de l’huile de tournesol, de maïs,carthame ou soja, . Il faudra plutôt consommer des aliments riches en oméga 3 comme les noix, les huiles de lin, de cameline, de chanvre ou de colza. Malheureusement, souvent lors d’inflammation, la transformation des oméga 3 d’origine végétale ne peut se faire correctement afin d’obtenir de l’EPA ou de la DHA qui possède l’activité anti-inflammatoire. Dès lors, il faut favoriser la consommation de poissons des mers froides (sardines, anchois, saumon, etc.) et peut-être encore mieux prendre les oméga 3 sous forme de complément alimentaire (huile de poisson) .
4. Le rôle important du microbiote : prébiotiques et probiotiques
Une autre particularité de la diète méditerranéenne est sa richesse en fibres prébiotiques que l’on va trouver dans les légumes, les fruits et les légumineuses. Ainsi, on pensera aux fruits rouges, aux cerises et à la banane peu mure. Pour les légumes, on pensera à consommer des asperges très riches en bonnes fibres, des artichauts et surtout des crucifères. La famille des crucifères comprend le brocoli, le chou-fleur, les choux de Bruxelles et le chou frisé. Ces légumes sont particulièrement importants pour soutenir notre foie. Les légumineuses comme les lentilles, les pois chiches, les haricots sont des super aliments pour nos bonnes bactéries intestinales en raison de leur richesse en prébiotiques (galacto-oligosaccharides). Pour comprendre l’intérêt des prébiotiques dans l’inflammation de bas grade, il faut se rappeler qu’environ 80 % des déclencheurs inflammatoires proviennent de l’intestin en relation avec une dysbiose intestinale. Les prébiotiques vont soutenir notre écosystème intestinal et nous aider à réduire notre état inflammatoire. L’adjonction de produits lacto-fermentés riches en probiotiques est également une stratégie santé pour rétablir un microbiote plus sain .
· Compléments alimentaires dans l’inflammation de bas grade
La curcumine
La prise de curcumine est fortement recommandée dans les états inflammatoires de bas grade. Étant donné que la curcumine est mal absorbée, il est conseillé de prendre des formes bio-optimisée en synergie avec du gingembre ou du poivre noir afin d’améliorer son effet.
2. Les oméga 3
Les oméga 3 sont des puissants régulateurs de notre terrain inflammatoire. Des apports alimentaires corrects sont souvent difficiles à obtenir, raison pour laquelle il est souvent nécessaire de les prendre sous forme de compléments alimentaires. Les recommandations actuelles sont de consommer 1 gr par jour d’une combinaison EPA/DHA.
3. Les polyphénols
De nombreux polyphénols, aux effets anti-inflammatoires, peuvent être pris en compléments alimentaires tels que le resvératrol, la quercétine ou l’extrait de thé vert.
4. La vitamine D
On connaît les effets santé de la vitamine D concernant la protection contre l’ostéoporose, mais également dans l’immunité et le cancer. De nombreuses études confirment son utilité dans l’inflammation systémique et la correction d’une carence en vitamine D devient incontournable pour contrôler l’inflammation de bas grade.
· CONCLUSION :
Au niveau alimentaire :
Réduire les sucres, les féculents, les farines blanches, les produits transformés et les mauvaises graisses pro-inflammatoires (huile de tournesol, mais, soja, etc.)
Respecter les modes de cuissons qui sont souvent trop agressifs (moins de 150 degrés), favoriser la cuisson vapeur ou les cuissons lentes
Consommer une alimentation riche en fruits et légumes et épices, en mangeant une alimentation colorée et riche en prébiotiques et en aliments lactofermentés
Consommer des poissons des mers froides (sardines, saumon, anchois, etc.) 2 x par semaine
2. Compléments alimentaires:
Curcumine bio-optimisée en synergie avec du gingembre ou du poivre noir
Huile de poissons avec une combinaison de EPA/DHA 1gr par jour
Vitamine D selon carence, le plus souvent au moins 2000 UI/j
Probiotiques
Polyphénols en complément tels que resvératrol, quercétine ou extrait de thé vert (pas nécessaire si alimentation riche en fruits et légumes colorés et épices, aromates tels que gingembre, thym)

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